Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-02-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 février 1864 15 février 1864
Description : 1864/02/15 (A9,N184). 1864/02/15 (A9,N184).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033153
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
108 * L'ISTHME DE SUEZ,
comme faisable. Faites disparaître cette corvée, qui est mon
cauchemar.
Un exemple se présente à mon esprit, je le trouve en
Egypte même : il est d'hier. Un bassin se creuse à Suez
par les Messageries impériales. Je ne serai pas démenti par
l'ancien directeur des Messageries, aujourd'hui ministre des
travaux publics, l'honorable M. Béhic. Ce travail devait être
fait moyennant une corvée fournie par le gouvernement
égyptien. Le traité est conclu. Et puis, le gouvernement
égyptien trouva qu'il lui coûtait plus cher d'envoyer ses
travaileurs, et qu'il aurait beaucoup plus d'avantages à les
garder, qu'il trouverait mieux son compte à ce que le
bassin fût creusé par le travail libre que par le travail
forcé, parce que, depuis le traité avec les Messageries, il
s'était passé de l'autre côté de l'Océan de grands événe-
ments qui avaient changé la condition agricole de l'Egypte.
Le coton, autrefois très-bon marché, était très-cher, il y
avait de gros bénéfices pour l'Egypte à le cultiver depuis
qu'elle ne craignait plus la concurrence américaine. Le
vice-roi, qui est très-intelligent et bon calculateur, s'est dit :
« Je fournis aux Messageries impériales des travailleurs
de la corvée, c'est une erreur; j'aurais bien plus d'avan-
tages à garder ces hommes sur mes terres à coton et à su-
cre. » Et il a proposé à M. Béhic de ne plus lui fournir
des ouvriers par la corvée, en parlant aussi de l'humanité
qui s'y opposait. L'humanité! ah! c'est une si belle chose,
même pour les Orientaux. (Rires.) M. Béhic lui a répondu :
« Vous avez raison, l'humanité est une excellente chose;
mais calculons ce que, pour nous, coûtera votre huma-
nité? » Et le gouvernement égyptien, après avoir beaucoup
compté, beaucoup calculé; après avoir fumé beaucoup de
pipes et pris beaucoup de café, finit par s'exécuter et par
payer, si je ne me trompe, trois millions et quelques
cent mille francs à la Compagnie des Messageries, afin de
remplacer, pour le creusement du bassin de Suez, la corvée
à laquelle il était engagé par le travail libre.
Eh bien, qu'il fasse de même pour la Compagnie de
Suez. (Bravo! bravo!)
Je reprends la discussion des autres points.
Le canal d'eau douce est fait, personne ne peut conseiller
à la Compagnie de le céder ; elle en a besoin pour achever
le canal maritime, elle en a besoin pour transporter les
pierres de la carrière de Gebel-Geneffé; il n'y a donc pas
à s'occuper de la cession du canal d'eau douce.
Le gouvernement égyptien veut rentrer dans les conces-
sions de terres qu'il vous a faites? Mon Dieu ! pourquoi vous
y refuser? C'est un compte à faire entre vous et lui. Cette
question a une certaine gravité, et je vous demande la
permission de m'y arrêter.
Chez nous, à Paris surtout, on ne respecte peut-être pas
toujours assez la propriété particulière. Il y a ce qu'on ap-
pelle l'expropriation pour cause d'utilité publique, qui per-
met de vous dépouiller, à prix d'argent, et vous savez si on
en use (rires); cela coûte beaucoup d'argent, mais cela peut
se faire, c'est légal.
Les Orientaux ne savent pas ce que c'est que l'expro-
priation : ils y viendront peut-être; je le leur souhaite
moins que pour beaucoup d'autres choses. (Sourires.) Je
ne leur en fais pas mon compliment.
La base de toute expropriation, c'est la valeur. Si l'on
veut vous déposséder de vos terres, il faudra bien qu'on vous
indemnise, qu'on vous en donne le prix.
Je crois qu'il est impossible d'apprécier aujourd'hui la va-
leur des terrains dont vous êtes concessionnaires. Vous êtes
concessionnaires de toutes les terres que vous pouvez ar-
roser et fertiliser avec le canal d'eau douce.
Toutes les fois qu'il y a de l'eau en Egypte, il y a de la
fertilité, et toutes les terres que vous pouvez arroser vous
appartiennent à perpétuité d'après le droit musulman. Au-
jourd'hui on ne peut pas vous dire, elles valent tant, aban-
donnez-nous-les pour tel prix, parce qu'aujourd'hui ces
terres ne valent rien. Telle une terre qui est stérile et im-
productive, avant qu'un chemin de fer ou un canal soit
fait, acquiert une valeur qui est inappréciable tant que ce
chemin de fer ou ce canal n'est pas fait. Leur valeur ne
peut donc pas être appréciée aujourd'hui, cela est incontes-
table. Mais il y a un moyen de s'entendre. Pourquoi n'ad-
metterie7-vous pas comme base future le rachat après l'achè-
vement des travaux ? Pourquoi ne diriez-vous pas :
dans deux ans , dans trois ans, certains lots de ter-
rains seront successivement rachetés par le vice-roi, selon
la valeur qui leur aura alors été reconnue par une esti-
mation loyale et réciproque. Vous saurez alors ce que
vous vendrez. Mais si vous vendiez aujourd'hui ces terrains,
dont la valeur n'est pas appréciée et n'est pas appréciable,
ce serait ruine ou folie : ou vous vendriez pour rien, en
faisant payer la valeur actuelle, ou vous devriez demander
un prix exagéré quant à présent. Il faut donc attendre
que vous sachiez ce que valent vos terres pour les vendre.
Aujourd'hui, faites un arrangement, pour vendre par
rachat, à l'amiable, successivement et partiellement vos
terrains; n'agissez pas autrement.
Si l'on pouvait arriver à une conciliation encore pour
les terrains, il me semble que la plus grande partie des
difficultés du percement de l'isthme serait résolue.
Pour obtenir ce résultat, quelle est la seule marche à
suivre? Une marche toute simple; appelez la lumière et
la discussion sur vos affaires; elles ne peuvent qu'y gagner.
Toutes les fois qu'on discutera franchement, loyalement,
vous en sortirez victorieux. Vous n'avez à craindre que
l'obscurité et les ténèbies, ne vous y laissez pas surpren-
dre. Les ténèbres sont contre vous, la lumière est en votre
faveur. (Bravo! bravo!)
Eh bien, discutez, et n'oubliez pas que vous êtes les
défenseurs obligés, nécessaires, de vos actionnaires; discutez
dans leur intérêt et dans l'intérêt de l'honneur de la
France, que vous représentez dans cette affaire. Si vous
suivez cette voie ferme et conciliante, tâchez de vous entendre
d'abord directement avec le vice-roi; et si tout échoue,
s'il vous demande ce que vous ne devez et ne pouvez pas
comme faisable. Faites disparaître cette corvée, qui est mon
cauchemar.
Un exemple se présente à mon esprit, je le trouve en
Egypte même : il est d'hier. Un bassin se creuse à Suez
par les Messageries impériales. Je ne serai pas démenti par
l'ancien directeur des Messageries, aujourd'hui ministre des
travaux publics, l'honorable M. Béhic. Ce travail devait être
fait moyennant une corvée fournie par le gouvernement
égyptien. Le traité est conclu. Et puis, le gouvernement
égyptien trouva qu'il lui coûtait plus cher d'envoyer ses
travaileurs, et qu'il aurait beaucoup plus d'avantages à les
garder, qu'il trouverait mieux son compte à ce que le
bassin fût creusé par le travail libre que par le travail
forcé, parce que, depuis le traité avec les Messageries, il
s'était passé de l'autre côté de l'Océan de grands événe-
ments qui avaient changé la condition agricole de l'Egypte.
Le coton, autrefois très-bon marché, était très-cher, il y
avait de gros bénéfices pour l'Egypte à le cultiver depuis
qu'elle ne craignait plus la concurrence américaine. Le
vice-roi, qui est très-intelligent et bon calculateur, s'est dit :
« Je fournis aux Messageries impériales des travailleurs
de la corvée, c'est une erreur; j'aurais bien plus d'avan-
tages à garder ces hommes sur mes terres à coton et à su-
cre. » Et il a proposé à M. Béhic de ne plus lui fournir
des ouvriers par la corvée, en parlant aussi de l'humanité
qui s'y opposait. L'humanité! ah! c'est une si belle chose,
même pour les Orientaux. (Rires.) M. Béhic lui a répondu :
« Vous avez raison, l'humanité est une excellente chose;
mais calculons ce que, pour nous, coûtera votre huma-
nité? » Et le gouvernement égyptien, après avoir beaucoup
compté, beaucoup calculé; après avoir fumé beaucoup de
pipes et pris beaucoup de café, finit par s'exécuter et par
payer, si je ne me trompe, trois millions et quelques
cent mille francs à la Compagnie des Messageries, afin de
remplacer, pour le creusement du bassin de Suez, la corvée
à laquelle il était engagé par le travail libre.
Eh bien, qu'il fasse de même pour la Compagnie de
Suez. (Bravo! bravo!)
Je reprends la discussion des autres points.
Le canal d'eau douce est fait, personne ne peut conseiller
à la Compagnie de le céder ; elle en a besoin pour achever
le canal maritime, elle en a besoin pour transporter les
pierres de la carrière de Gebel-Geneffé; il n'y a donc pas
à s'occuper de la cession du canal d'eau douce.
Le gouvernement égyptien veut rentrer dans les conces-
sions de terres qu'il vous a faites? Mon Dieu ! pourquoi vous
y refuser? C'est un compte à faire entre vous et lui. Cette
question a une certaine gravité, et je vous demande la
permission de m'y arrêter.
Chez nous, à Paris surtout, on ne respecte peut-être pas
toujours assez la propriété particulière. Il y a ce qu'on ap-
pelle l'expropriation pour cause d'utilité publique, qui per-
met de vous dépouiller, à prix d'argent, et vous savez si on
en use (rires); cela coûte beaucoup d'argent, mais cela peut
se faire, c'est légal.
Les Orientaux ne savent pas ce que c'est que l'expro-
priation : ils y viendront peut-être; je le leur souhaite
moins que pour beaucoup d'autres choses. (Sourires.) Je
ne leur en fais pas mon compliment.
La base de toute expropriation, c'est la valeur. Si l'on
veut vous déposséder de vos terres, il faudra bien qu'on vous
indemnise, qu'on vous en donne le prix.
Je crois qu'il est impossible d'apprécier aujourd'hui la va-
leur des terrains dont vous êtes concessionnaires. Vous êtes
concessionnaires de toutes les terres que vous pouvez ar-
roser et fertiliser avec le canal d'eau douce.
Toutes les fois qu'il y a de l'eau en Egypte, il y a de la
fertilité, et toutes les terres que vous pouvez arroser vous
appartiennent à perpétuité d'après le droit musulman. Au-
jourd'hui on ne peut pas vous dire, elles valent tant, aban-
donnez-nous-les pour tel prix, parce qu'aujourd'hui ces
terres ne valent rien. Telle une terre qui est stérile et im-
productive, avant qu'un chemin de fer ou un canal soit
fait, acquiert une valeur qui est inappréciable tant que ce
chemin de fer ou ce canal n'est pas fait. Leur valeur ne
peut donc pas être appréciée aujourd'hui, cela est incontes-
table. Mais il y a un moyen de s'entendre. Pourquoi n'ad-
metterie7-vous pas comme base future le rachat après l'achè-
vement des travaux ? Pourquoi ne diriez-vous pas :
dans deux ans , dans trois ans, certains lots de ter-
rains seront successivement rachetés par le vice-roi, selon
la valeur qui leur aura alors été reconnue par une esti-
mation loyale et réciproque. Vous saurez alors ce que
vous vendrez. Mais si vous vendiez aujourd'hui ces terrains,
dont la valeur n'est pas appréciée et n'est pas appréciable,
ce serait ruine ou folie : ou vous vendriez pour rien, en
faisant payer la valeur actuelle, ou vous devriez demander
un prix exagéré quant à présent. Il faut donc attendre
que vous sachiez ce que valent vos terres pour les vendre.
Aujourd'hui, faites un arrangement, pour vendre par
rachat, à l'amiable, successivement et partiellement vos
terrains; n'agissez pas autrement.
Si l'on pouvait arriver à une conciliation encore pour
les terrains, il me semble que la plus grande partie des
difficultés du percement de l'isthme serait résolue.
Pour obtenir ce résultat, quelle est la seule marche à
suivre? Une marche toute simple; appelez la lumière et
la discussion sur vos affaires; elles ne peuvent qu'y gagner.
Toutes les fois qu'on discutera franchement, loyalement,
vous en sortirez victorieux. Vous n'avez à craindre que
l'obscurité et les ténèbies, ne vous y laissez pas surpren-
dre. Les ténèbres sont contre vous, la lumière est en votre
faveur. (Bravo! bravo!)
Eh bien, discutez, et n'oubliez pas que vous êtes les
défenseurs obligés, nécessaires, de vos actionnaires; discutez
dans leur intérêt et dans l'intérêt de l'honneur de la
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suivez cette voie ferme et conciliante, tâchez de vous entendre
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