Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-12-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 décembre 1862 01 décembre 1862
Description : 1862/12/01 (A7,N155). 1862/12/01 (A7,N155).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203309c
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 3*73
» Le régisseur de la Compagnie,jeune homme plein
d'intelligence et de capacité, était venu, t'ai-je dit, au-
devant de nous avec des chevaux et des voitures afin
de nous éviter un assez long détour sur le canal. Il
nous fit traverser, qui à cheval, qui à âne, qui à dro-
madaire, 8 à 10 kilomètres de désert, qui nous séparaient
d'une très-grande oasislde palmiers et autres cultures,
entièrement arabe. Par suite d'anciennes habitudes, je
préférai le cheval aux autres montures, mais notre
jeune compagne voulut essayer du dromadaire, et ne
parut nullement effrayée de se voir si loin de terre.
Arrivés 'au village arabe, dont je t'écrirais le nom si
j'avais pu le retenir, nous eûmes à subir, c'est bien le
mot, l'hospitalité du pays dans tous ses détails les
moins anacréontiques. Le festin, dont le souvenir me
soulève encore le cœur et qu'il nous fallut attendre des
heures entières,^fut cause que le soleil était à son dé-
clin quand nous arrivâmes à Tell-El-Kebir. Nous en
partîmes vers les 10 heures du soir sur les embarca-
tions de la Compagnie, remorquées par des chameaux,
faute de vent. Il importait d'atteindre Zagazig à la
pointe du jour, parce que là est la tête d'un embranche-
ment de chemin qui va rejoindre la ligne du Caire,
mais n'a qu'un départ par jour. Zagazig est un entre-
pôt assez important : beaucoup de marchandises y ar-
rivent de l'intérieur pour se répandre de tous côtés, soit
par le chemin de fer, soit par les diverses branches de
navigation.
» Je te fais grâce de mon séjour au Caire, de ses
mosquées, de sa citadelle, de ses pyramides, tous dé-
tails qui traînent partout, mais qui n'en sont pas moins
frappants chaque fois que l'on se trouve dans cette
étrange ville, type certainement le plus parfait et le
plus complet de l'Orient. Mais je veux, et c'est la vraie
raison qui m'a fait reprendre la plume, je veux te par-
ler de mon. excursion à Suez. J'avais le plus vif désir
de voir au moins un point de la mer Rouge, et de pré-
férence le point illustré par le passage des Hébreux.
Ayant appris, que M. le consul général de France,
M. Béhic, directeur général des Messageries, M. de
Lesseps et autres allaient inaugurer à Suez le service
de l'Indo-Chine, je résolus de profiter du moment,
convié d'ailleurs par une gracieuse invitation. Nous
montâmes tous en wagons de première classe fort bien
installés. Les partisans quand même du pittoresque et
de la poésie se récrieront peut-être : « Quoi, traverser le
désert à la vapeur? » Qu'ils se rassurent ! il y en aura
toujours assez pour les amateurs forcenés de chameaux,
du sable et de la privation d'eau. Pour moi, je l'avoue,
le désert est, comme la mer, une chose bonne à voir,
bonne à traverser, mais le plus vite possible.
» Grâce à la providence qui se cache en Egypte sous
les traits de M. de Lesseps, Suez aura l'an prochain de
l'eau douce à discrétion. En attendant, il n'y a que celle
apportée par le chemin de fer et les chameaux, ou l'eau
que distillent les appareils de nos bateaux à vapeur.
Douze à quinze mille ouvriers vont s'occuper de pro-
longer le canal d'eau douce de Timsah à Suez, et il faut
qu'ils suivent ou plutôt qu'ils précèdent les ouvriers du
canal maritime. Suez devra encore à ce grand travail
d'être en rapport direct avec les bâtiments mouillés en
rade; dans l'état actuel, il faut une heure ou une heure
et demie, selon la marée, pour arriver à bord des grands
navires, d'où résultent des transbordements de mar-
chandises longs et coûteux. Le canal utilisera ses dé-
blais pour former un plateau sur lequel la ville se
transportera probablement, et elle n'aura pas, on doit
l'avouer, de grands, frais de déménagement à faire.
Quelques baraques, un splendide et excellent hôtel,
bâti aux frais du vice-roi, exploité par des Anglais et
servi par des Indiens, voilà tout, absolument tout.
» Des canots transportèrent. tous les invités à bord
de TImpératrice, magnifique bateau à vapeur des Messa-
geries, qui venait d'accomplir à jour fixe la traversée
de Marseille à Suez, arrivé en si bon état que, coque
et m chine, tout paraissait être sorti la .veille des
chantiers de laCiotat. L'ingénieur constructeur qui ac-
compagnait M. Béhic, a dû être flatté de l'unanime
admiration dont tous nous avons été saisis, savants et
ignorants, marins et hommes de terre. Le beau pont de
ce bâtiment modèle offre une promenade dé plus de cent
mètres de longueur; le salon, à la fois simple et somp-
tueux, occupe tout l'arrière, et peut facilement contenir,
à sa double rangée de tables, cent vingt convives ; les
cabines, disposées à droite et à gauche, sont spacieuses,
parfaitement aérées et commodément aménagées. Dans
l'entre-pont, se déroule un double rang de cabines né-
cessairement moins éclairées, et qui, plongeant à
moitié dans l'eau, doivent être plus fraîches que celles
du dessus. J'oubliais de dire que l'on a établi dans le
grand salon de ces espèces de grands éventails mobiles,
que l'on agite au moyen de cordes, afin de donner de
l'air pendant les fortes chaleurs. J'avais déjà vu ce sys-
tème de rafraîchissement employé dans les pays inter-
tropicaux, notamment à Guyaquil, et l'effet en est très-
agréable à ceux qui craignent plus d'être étouffés que
d'attraper des courants d'air.
» La confiance aujourd'hui bien justifiée des Messa-
geries était telle qu'elles avaient annoncé le départ ré-
glementaire du 21 avant même de connaître l'arrivée
de l'Impératrice à Suez. Dès le 26 on aurait pu partir si
l'on n'avait attendu quelques colis en retard, que l'on
a chargé hier matin 27. Toos les passagers se sont em
barqués le 26 au soir; nous étions à bord quand un petit
steamer les a amenés avec quelques visiteurs anglais ;
ceux-ci ont eu le bon goût de saluer leur majestueux
concurrent d'un immense hourra, qui leur a été rendu
par l'équipage et même par les visiteurs.
» Le 27, jour du départ, a eu lieu un banquet, non
pas à bord du bâtiment en partance, mais de son collè-
gue, pareil en tout, le Cambodge, mouillé tout auprès.
Partis à quelques jours de distance, ces deux paque-
bots avaient suivi la même marche, avaient eu le même
nombre de jours de navigation, et le Cambodge va at-
tendre patiemment le 21 du mois prochain pour se met.
tre en route. D'ici là, un et peut-être deux autres pa-
quebots viendront le rejoindre, et, au jour fixé, se
lanceront dans les mers de la Chine et du Japon.
» Entre les divers employés de la Compagnie, les of-
ficiers français et anglais des bâtiments en station et des
» Le régisseur de la Compagnie,jeune homme plein
d'intelligence et de capacité, était venu, t'ai-je dit, au-
devant de nous avec des chevaux et des voitures afin
de nous éviter un assez long détour sur le canal. Il
nous fit traverser, qui à cheval, qui à âne, qui à dro-
madaire, 8 à 10 kilomètres de désert, qui nous séparaient
d'une très-grande oasislde palmiers et autres cultures,
entièrement arabe. Par suite d'anciennes habitudes, je
préférai le cheval aux autres montures, mais notre
jeune compagne voulut essayer du dromadaire, et ne
parut nullement effrayée de se voir si loin de terre.
Arrivés 'au village arabe, dont je t'écrirais le nom si
j'avais pu le retenir, nous eûmes à subir, c'est bien le
mot, l'hospitalité du pays dans tous ses détails les
moins anacréontiques. Le festin, dont le souvenir me
soulève encore le cœur et qu'il nous fallut attendre des
heures entières,^fut cause que le soleil était à son dé-
clin quand nous arrivâmes à Tell-El-Kebir. Nous en
partîmes vers les 10 heures du soir sur les embarca-
tions de la Compagnie, remorquées par des chameaux,
faute de vent. Il importait d'atteindre Zagazig à la
pointe du jour, parce que là est la tête d'un embranche-
ment de chemin qui va rejoindre la ligne du Caire,
mais n'a qu'un départ par jour. Zagazig est un entre-
pôt assez important : beaucoup de marchandises y ar-
rivent de l'intérieur pour se répandre de tous côtés, soit
par le chemin de fer, soit par les diverses branches de
navigation.
» Je te fais grâce de mon séjour au Caire, de ses
mosquées, de sa citadelle, de ses pyramides, tous dé-
tails qui traînent partout, mais qui n'en sont pas moins
frappants chaque fois que l'on se trouve dans cette
étrange ville, type certainement le plus parfait et le
plus complet de l'Orient. Mais je veux, et c'est la vraie
raison qui m'a fait reprendre la plume, je veux te par-
ler de mon. excursion à Suez. J'avais le plus vif désir
de voir au moins un point de la mer Rouge, et de pré-
férence le point illustré par le passage des Hébreux.
Ayant appris, que M. le consul général de France,
M. Béhic, directeur général des Messageries, M. de
Lesseps et autres allaient inaugurer à Suez le service
de l'Indo-Chine, je résolus de profiter du moment,
convié d'ailleurs par une gracieuse invitation. Nous
montâmes tous en wagons de première classe fort bien
installés. Les partisans quand même du pittoresque et
de la poésie se récrieront peut-être : « Quoi, traverser le
désert à la vapeur? » Qu'ils se rassurent ! il y en aura
toujours assez pour les amateurs forcenés de chameaux,
du sable et de la privation d'eau. Pour moi, je l'avoue,
le désert est, comme la mer, une chose bonne à voir,
bonne à traverser, mais le plus vite possible.
» Grâce à la providence qui se cache en Egypte sous
les traits de M. de Lesseps, Suez aura l'an prochain de
l'eau douce à discrétion. En attendant, il n'y a que celle
apportée par le chemin de fer et les chameaux, ou l'eau
que distillent les appareils de nos bateaux à vapeur.
Douze à quinze mille ouvriers vont s'occuper de pro-
longer le canal d'eau douce de Timsah à Suez, et il faut
qu'ils suivent ou plutôt qu'ils précèdent les ouvriers du
canal maritime. Suez devra encore à ce grand travail
d'être en rapport direct avec les bâtiments mouillés en
rade; dans l'état actuel, il faut une heure ou une heure
et demie, selon la marée, pour arriver à bord des grands
navires, d'où résultent des transbordements de mar-
chandises longs et coûteux. Le canal utilisera ses dé-
blais pour former un plateau sur lequel la ville se
transportera probablement, et elle n'aura pas, on doit
l'avouer, de grands, frais de déménagement à faire.
Quelques baraques, un splendide et excellent hôtel,
bâti aux frais du vice-roi, exploité par des Anglais et
servi par des Indiens, voilà tout, absolument tout.
» Des canots transportèrent. tous les invités à bord
de TImpératrice, magnifique bateau à vapeur des Messa-
geries, qui venait d'accomplir à jour fixe la traversée
de Marseille à Suez, arrivé en si bon état que, coque
et m chine, tout paraissait être sorti la .veille des
chantiers de laCiotat. L'ingénieur constructeur qui ac-
compagnait M. Béhic, a dû être flatté de l'unanime
admiration dont tous nous avons été saisis, savants et
ignorants, marins et hommes de terre. Le beau pont de
ce bâtiment modèle offre une promenade dé plus de cent
mètres de longueur; le salon, à la fois simple et somp-
tueux, occupe tout l'arrière, et peut facilement contenir,
à sa double rangée de tables, cent vingt convives ; les
cabines, disposées à droite et à gauche, sont spacieuses,
parfaitement aérées et commodément aménagées. Dans
l'entre-pont, se déroule un double rang de cabines né-
cessairement moins éclairées, et qui, plongeant à
moitié dans l'eau, doivent être plus fraîches que celles
du dessus. J'oubliais de dire que l'on a établi dans le
grand salon de ces espèces de grands éventails mobiles,
que l'on agite au moyen de cordes, afin de donner de
l'air pendant les fortes chaleurs. J'avais déjà vu ce sys-
tème de rafraîchissement employé dans les pays inter-
tropicaux, notamment à Guyaquil, et l'effet en est très-
agréable à ceux qui craignent plus d'être étouffés que
d'attraper des courants d'air.
» La confiance aujourd'hui bien justifiée des Messa-
geries était telle qu'elles avaient annoncé le départ ré-
glementaire du 21 avant même de connaître l'arrivée
de l'Impératrice à Suez. Dès le 26 on aurait pu partir si
l'on n'avait attendu quelques colis en retard, que l'on
a chargé hier matin 27. Toos les passagers se sont em
barqués le 26 au soir; nous étions à bord quand un petit
steamer les a amenés avec quelques visiteurs anglais ;
ceux-ci ont eu le bon goût de saluer leur majestueux
concurrent d'un immense hourra, qui leur a été rendu
par l'équipage et même par les visiteurs.
» Le 27, jour du départ, a eu lieu un banquet, non
pas à bord du bâtiment en partance, mais de son collè-
gue, pareil en tout, le Cambodge, mouillé tout auprès.
Partis à quelques jours de distance, ces deux paque-
bots avaient suivi la même marche, avaient eu le même
nombre de jours de navigation, et le Cambodge va at-
tendre patiemment le 21 du mois prochain pour se met.
tre en route. D'ici là, un et peut-être deux autres pa-
quebots viendront le rejoindre, et, au jour fixé, se
lanceront dans les mers de la Chine et du Japon.
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