Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-08-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 août 1863 15 août 1863
Description : 1863/08/15 (A8,N172). 1863/08/15 (A8,N172).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203251m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 343
» Mais, même le canal fini, qui peut dire qu'il ne sera
pas exposé à être envasé quelque jour par les courants
constamment chargés de matières de la mer Rouge ou
comblé par les tempêtes de sables qui ont recouvert
tant de colonnes, tant de capitales et tant de temples en
Égypte et en Nubie ? Que d'efforts ne faudra-t-il pas pour
maintenir le canal à travers des lacs sans profondeur,
dont l'un a 30 milles de longueur ! En supposant que
le canal soit achevé, qu'il reste intact, qui assurera les
actionnaires que les armateurs seront disposés à payer
les gros péages sur lesquels leurs dividendes sont cal-
culés, et quel droit avons-nous de présumer que le
commerce d'Orient, s'étant déjà arrangé d'autres routes
convenables, en sera détourné au profit de la nouvelle
route? Si la rapidité est le seul objet du transit avec
l'Inde, il y est pourvu par le chemin de fer d'Alexandrie
à Suez ; si le temps importe peu, nous avons le voyage
autour du Cap. Les voyageurs continueront à préférer
la route de terre ; les capitaines et les négociants trou-
veront le plus long voyage moins dangereux pour les
navires et les cargaisons, et plus favorable à la santé
de leurs matelots qu'une traversée sur un canal sta-
gnant et sur une quantité de marécages bourbeux, fu-
mant sous le soleil de l'Égypte.
» En un mot, M. de Lesseps et les aventuriers qui
l'ont soutenu de leur argent feront bien de se tirer
promptement d'une mauvaise affaire et de faire le meil-
leur marché qu'ils pourront avec la Porte et le pacha.
Le sultan ne leur permettra pas de continuer leur tra-
vai) ; il les a sauvés de la mortification de découvrir
trop tard que son accomplissement excède leur puis-
sance, ou que, lorsqu'elle sera achevée, l'entreprise sur
laquelle ils ont fondé tant d'espérances se trouvera aussi
vide de résultats économiques que le tunnel de la
Tamise. »
SPECTATOR.
Triomphe de M. de Lesseps.
< Ce gentleman a arraché à la Porte la permission
de dépenser 250,000,000 de francs pour essayer de com-
pléter la moitié la plus difficile d'un plan impraticable.
Tel est le résultat de la lutte récente qui a eu lieu à
Constantinople, résultat qui a rempli la France de joie
et a poussé des journalistes anglais, qui pendant huit
ans avaient fait leur devoir en exposant les mensonges
du brillant auteur du projet, à accepter le canal de
Suez comme si déjà il était un fait accompli.
» M. de Lesseps a eu dès le début deux objets en
vue, l'un qui lui est cher comme auteur du projet, et
l'autre comme intrigant politique : percer l'isthme,
ainsi détourner vers la Méditerranée le courant du
grand trafic asiatique duquel, dans sa pensée, dépend
la richesse de l'Angleterre, ou, échouant de ce côté,
transformer l'Egypte en une dépendance française au
moyen de colonies de travailleurs. Une fois investie
de droits souverains sur une section quelconque du
territoire, la Compagnie, à la plus légère infraction de
ses énormes privilèges, aurait appelé la France à son
aide ; ou, confiant en ses forts et dans le commande-
ment de milliers d'artisans exercés, munie d'ailleurs
de moyens suffisants pour corrompre tout fonctionnai-
re local et diriger avec facilité une révolution inté-
rieure. Il est indispensable à un ministère britannique
de résister à cette dernière partie du plan, et, accep-
tant la marche la plus aisée, quoique la plus mala-
droite, le cabinet attaqua le projet tout entier. Lord
Palmerston se transforma en engineer dans cette cir-
constance comme, dans d'autres occasions, il s'était
transformé en maitre d'école et en théologien, et à peu
près avec un égal succès. Les doutes de la Porte, qui,
dans la décadence de sa puissance, confond souvent
ses soupçons avec son orgueil, furent soigneusement
entretenus, et le sultan frappa vigoureusement sur les
deux sections du projet. Le travail forcé doit cesser,
ce qui est la prohibition du canal, et les terres doivent
être rendues, ce qui est un veto sur la souveraineté
française. La suzeraineté de la Porte et, par consé-
quent, les droits du sultan ne pouvaient faire question,
et le projet semblait être perdu. Mais une vive exci-
tation se manifesta dans toute la France. M. de Lesseps
présenta un rapport foudroyant dans lequel il dénonça
la perfidie anglaise et maintint l'indépendance du pa-
cha; un prince impérial déclara à Alexandrie que le
canal devait être exécuté et qu'il le serait, quelle que
fût l'opposition faite par l'allié de son cousin ; l'am-
bassade française à Constantinople prit un ton qu'il
n'était pas facile de distinguer de la menace; l'alliance
anglo-française fut considérée comme étant en danger,
et le ministère britannique et le sultan consentirent à
la fois à un compromis raisonnable, mais dépourvu dé
tout principe. Les Egyptiens furent immolés sur IC l'au-
tel de la civilisation. » Les Français consentirent à aban-
donner leurs droits sur les terres, violant visiblement
l'indépendance du sultan, et l'Angleterre consentit à
accorder que les Egyptiens fussent condamnés à une
mort lente sur les travaux.
» Le canal doit se poursuivre et 20,000 fellahs doivent
être arrachés mois par mois à leurs demeures, entre-
prendre sous le fouet un voyage d'un mois afin de
travailler pendant un autre mois à creuser les marais
pestilentiels du Delta et être ensuite renvoyés en dé-
pensant, pendant un troisième mois, leurs misérables
salaires et le peu de vigueur qu'a pu laisser à des
Arabes à demi nourris l'air des marécages, et aller re-
joindre, en frayant leur chemin à travers les autorités
officielles, leurs pauvres petits enfants mourant de
faim à la maison. Le principe de la traite des esclaves
va être appliqué dans toute la vallée du Nil, de façon
à s'étendre en cinq ans à toute la population mâle et
adulte, et tous les fellahs égyptiens passeront ainsi des
mois de leur vie dans un esclavage virtuel, pour que
la marche de la civilisation ne soit pas arrêtée ou que
la France ne subisse pas à la face du monde une dé-
faite diplomatique.
» L'échec éprouvé par les idées européennes n'est pas
moindre que l'échec infligé au prestige britannique, et
nous pouvons à peine nous étonner que des échecs si
grands et si violateurs des principes aient étourdi des
Anglais au point de leur inspirer la conviction que ce
canal pour lequel la justice, la loi internationale et
» Mais, même le canal fini, qui peut dire qu'il ne sera
pas exposé à être envasé quelque jour par les courants
constamment chargés de matières de la mer Rouge ou
comblé par les tempêtes de sables qui ont recouvert
tant de colonnes, tant de capitales et tant de temples en
Égypte et en Nubie ? Que d'efforts ne faudra-t-il pas pour
maintenir le canal à travers des lacs sans profondeur,
dont l'un a 30 milles de longueur ! En supposant que
le canal soit achevé, qu'il reste intact, qui assurera les
actionnaires que les armateurs seront disposés à payer
les gros péages sur lesquels leurs dividendes sont cal-
culés, et quel droit avons-nous de présumer que le
commerce d'Orient, s'étant déjà arrangé d'autres routes
convenables, en sera détourné au profit de la nouvelle
route? Si la rapidité est le seul objet du transit avec
l'Inde, il y est pourvu par le chemin de fer d'Alexandrie
à Suez ; si le temps importe peu, nous avons le voyage
autour du Cap. Les voyageurs continueront à préférer
la route de terre ; les capitaines et les négociants trou-
veront le plus long voyage moins dangereux pour les
navires et les cargaisons, et plus favorable à la santé
de leurs matelots qu'une traversée sur un canal sta-
gnant et sur une quantité de marécages bourbeux, fu-
mant sous le soleil de l'Égypte.
» En un mot, M. de Lesseps et les aventuriers qui
l'ont soutenu de leur argent feront bien de se tirer
promptement d'une mauvaise affaire et de faire le meil-
leur marché qu'ils pourront avec la Porte et le pacha.
Le sultan ne leur permettra pas de continuer leur tra-
vai) ; il les a sauvés de la mortification de découvrir
trop tard que son accomplissement excède leur puis-
sance, ou que, lorsqu'elle sera achevée, l'entreprise sur
laquelle ils ont fondé tant d'espérances se trouvera aussi
vide de résultats économiques que le tunnel de la
Tamise. »
SPECTATOR.
Triomphe de M. de Lesseps.
< Ce gentleman a arraché à la Porte la permission
de dépenser 250,000,000 de francs pour essayer de com-
pléter la moitié la plus difficile d'un plan impraticable.
Tel est le résultat de la lutte récente qui a eu lieu à
Constantinople, résultat qui a rempli la France de joie
et a poussé des journalistes anglais, qui pendant huit
ans avaient fait leur devoir en exposant les mensonges
du brillant auteur du projet, à accepter le canal de
Suez comme si déjà il était un fait accompli.
» M. de Lesseps a eu dès le début deux objets en
vue, l'un qui lui est cher comme auteur du projet, et
l'autre comme intrigant politique : percer l'isthme,
ainsi détourner vers la Méditerranée le courant du
grand trafic asiatique duquel, dans sa pensée, dépend
la richesse de l'Angleterre, ou, échouant de ce côté,
transformer l'Egypte en une dépendance française au
moyen de colonies de travailleurs. Une fois investie
de droits souverains sur une section quelconque du
territoire, la Compagnie, à la plus légère infraction de
ses énormes privilèges, aurait appelé la France à son
aide ; ou, confiant en ses forts et dans le commande-
ment de milliers d'artisans exercés, munie d'ailleurs
de moyens suffisants pour corrompre tout fonctionnai-
re local et diriger avec facilité une révolution inté-
rieure. Il est indispensable à un ministère britannique
de résister à cette dernière partie du plan, et, accep-
tant la marche la plus aisée, quoique la plus mala-
droite, le cabinet attaqua le projet tout entier. Lord
Palmerston se transforma en engineer dans cette cir-
constance comme, dans d'autres occasions, il s'était
transformé en maitre d'école et en théologien, et à peu
près avec un égal succès. Les doutes de la Porte, qui,
dans la décadence de sa puissance, confond souvent
ses soupçons avec son orgueil, furent soigneusement
entretenus, et le sultan frappa vigoureusement sur les
deux sections du projet. Le travail forcé doit cesser,
ce qui est la prohibition du canal, et les terres doivent
être rendues, ce qui est un veto sur la souveraineté
française. La suzeraineté de la Porte et, par consé-
quent, les droits du sultan ne pouvaient faire question,
et le projet semblait être perdu. Mais une vive exci-
tation se manifesta dans toute la France. M. de Lesseps
présenta un rapport foudroyant dans lequel il dénonça
la perfidie anglaise et maintint l'indépendance du pa-
cha; un prince impérial déclara à Alexandrie que le
canal devait être exécuté et qu'il le serait, quelle que
fût l'opposition faite par l'allié de son cousin ; l'am-
bassade française à Constantinople prit un ton qu'il
n'était pas facile de distinguer de la menace; l'alliance
anglo-française fut considérée comme étant en danger,
et le ministère britannique et le sultan consentirent à
la fois à un compromis raisonnable, mais dépourvu dé
tout principe. Les Egyptiens furent immolés sur IC l'au-
tel de la civilisation. » Les Français consentirent à aban-
donner leurs droits sur les terres, violant visiblement
l'indépendance du sultan, et l'Angleterre consentit à
accorder que les Egyptiens fussent condamnés à une
mort lente sur les travaux.
» Le canal doit se poursuivre et 20,000 fellahs doivent
être arrachés mois par mois à leurs demeures, entre-
prendre sous le fouet un voyage d'un mois afin de
travailler pendant un autre mois à creuser les marais
pestilentiels du Delta et être ensuite renvoyés en dé-
pensant, pendant un troisième mois, leurs misérables
salaires et le peu de vigueur qu'a pu laisser à des
Arabes à demi nourris l'air des marécages, et aller re-
joindre, en frayant leur chemin à travers les autorités
officielles, leurs pauvres petits enfants mourant de
faim à la maison. Le principe de la traite des esclaves
va être appliqué dans toute la vallée du Nil, de façon
à s'étendre en cinq ans à toute la population mâle et
adulte, et tous les fellahs égyptiens passeront ainsi des
mois de leur vie dans un esclavage virtuel, pour que
la marche de la civilisation ne soit pas arrêtée ou que
la France ne subisse pas à la face du monde une dé-
faite diplomatique.
» L'échec éprouvé par les idées européennes n'est pas
moindre que l'échec infligé au prestige britannique, et
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